Tout commence par un petit détour à Saint-Brieuc à l’occasion du forum du voyage à vélo organisé par l’association Vélo Utile. Sur place un stand présente un parcours cyclo dénommé « le tour de Manche ». Intéressant !
Il s’agit en fait de deux boucles franco-britanniques permettant de découvrir les côtes et les paysages environnants à cette mer toute proche. La première a pour objectif la côte Nord de la Bretagne et le Devon, dont le parc national de Dartmoor, et le Dorset. La seconde, dénommée le petit tour de Manche privilégie la presqu’île du Cotentin et la Côte Jurassique britannique. Toutes les deux se basent sur un réseau de routes adaptées à la pratique du vélo, des routesEurovélo bien connues aux initiatives locales plus ou moins développées.
Pour ma reprise du vélo et du cyclo-camping en particulier, mon choix se porte sur la première boucle (la bleue) permettant de profiter au mieux de la côte britannique, avec deux semaines pour le tout, à cheval sur les mois de juillet et août.Ce petit récit avec principalement des photos pour vous présenter ces quelques jours sur cette boucle toute proche mais qui permet (comme c’est souvent le cas en vélo) de (re)découvrir les paysages.
Avant le départ, je fais l’acquisition auprès de l’excellente librairie Ariane de Rennes (la librairie du voyage) d’un guide des éditions « Itinérance à Vélo » dédié à cette boucle. Je ne peux que le conseiller pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il est très complet et vraiment pratique avec une liste exhaustive des hébergements possibles, des cartes précises des parcours (avec dénivelés) et des principales villes traversées, des commentaires touristiques et une planification journalière en fonction de votre rythme. De plus, les cartes de ce guide seront vraiment nécessaire pour la partie britannique après le parc de Dartmoor, car les indications sont vraiment trop juste pour suivre le parcours. Bref, un excellent investissement !
Départ donc de Saint-Malo en cette fin de matinée ensoleillée. Cela s’annonce plutôt bien ! En fait et pour évoquer d’ores et déjà la météo, je suis en Bretagne et je vais aller en Angleterre … Je ne fais pas cette route pour le soleil ! La météo au cours de ces deux semaines sera d’un tiers de beau temps, un tiers de gris et un tiers de pluie (parfois grosses, l’une du côté sud de la Manche, l’autre du côté Nord).
J’effectue la première partie française avec un mélange de souvenirs mais également de découvertes car le simple fait de parcourir ces chemins à vélo permettent de les appréhender d’une manière nouvelle.
Au programme de ces premières journées sous le soleil : Dinard, le château du Guildo, la baie de la Fresnay (j’y croise d’ailleurs à contre-sens et à vive allure les participants de la randonnée VTT du fort La Latte), les couleurs pourpres de la lande du cap Fréhel, puis la baie de Saint-Brieuc.
La route emprunte régulièrement les anciennes voies ferrées désaffectées (ainsi que leurs ponts) et dorénavant ouvertes aux randonneurs.
Après un passage par le port du Légué de Saint-Brieuc, direction, sous un ciel un peu moins engageant, vers les paysages connus grâce en particulier à la randonnée des Vélos Verts de l’Ic du côté d’Etables sur Mer : Pordic, Binic, Portrieux puis Plouha.
Quelques kilomètres après Plouha, petit intermède historique en passant sur la plage Bonaparte à partir de laquelle des aviateurs britanniques et américains ont être exfiltrés lors de la seconde guerre mondiale. Son accès permet de profiter malgré la pluie de magnifiques vues du haut des falaises.
Le lendemain, de nouveau sous un ciel bleu, passage par l’abbaye de Beauport, Paimpol, Tréguier (où naquit Ernest Renan)
Pour ma part, découverte de Tréguier, très jolie petite ville avec un coin pique-nique (avec galette au beurre fourrée à la framboise au dessert) bien sympathique sur la vallée du Guindy et son pont suspendu.
Le passage par Perros-Guirrec et la côte de granit rose s’effectue sous un ciel très gris, malgré les couleurs des portails et murs des maisons, avant d’arriver sur l’île Grande, dont la plage face aux vents avec ses nombreux galets, permet une impressionnante compétition de cairns.
Après une matinée sous une première grosse pluie, arrivée dans le Finistère sous un soleil éphémère du côté de Locquirec.
Locquirec, son port, son hôtel, son marché et sa flore sauvagement mise à mal par une faune pas très locale, (le temps du passage du cirque).
Les traditions se perdent vraiment dans le Finistère … Même le bar de Christ est fermé …
Toutefois, la langue bretonne y est très vivace et les panneaux sont systématiquement bilingues (avec ici la conjonction des Eurovélos 1 et 4).
Après un rapide passage par Morlaix, direction le pays de … de quoi déjà ?
Ah oui, le pays de l’artichaut ! D’ailleurs dégusté dès le soir même dans la petite crêperie « Tal an Iliz » (au pied de l’église) de Roscoff plutôt sympathique (bien que les tarifs soient un peu élevés). La cité de Roscoff a vraiment du caractère et mérite bien une visite.
Et avant qu’il ne soit trop tard …
Il est temps d’aller au Fest Noz.
Roscoff, c’est aussi l’île de Batz toute proche ! Superbe soleil pour la courte traversée.
Le camping mi-sauvage est sur les dunes. Petite installation classique au coucher du soleil.
Le lendemain matin, vue de la tente …
L’« Armorique » des Brittany Ferries attend pour le départ vers l’Angleterre.
Quelques heures plus tard, le Gwen A Du flotte du côté de Plymouth.
Sous un soleil magnifique, je m’oriente grâce à la signalétique spécifique au tour de Manche mais surtout celle du « National Cycle Network » mise en place par l’association « Sustrans » et sponsorisé par la loterie nationale britannique.
J’ai un peu de mal à rouler sur le bon côté de la route … et en croisant un autre cycliste sur une voie dédiée je ne trouve que l’excuse suivante « Sorry, I’m French ! » pour mon entêtement à rester sur le côté droit. A part ce petit désagrément, Plymouth est vraiment agréable sous ce soleil.
Et le réseau est particulièrement efficace avec des signalétiques bien présentes et même des infrastructures dédiées tel que ce pont sur la rivière Plym que je vais longer pour rejoindre l’entrée du parc du Dartmoor.
Le chemin, en fait une ancienne voie ferrée, se fait rapidement plus champêtre avec, après une partie boisée où il est possible de rencontrer de drôles de bestioles, des points de vue sur des vallées verdoyantes.
J’arrive au point culminant de la journée avec des paysages sur les monts du Dartmoor.
Le soleil est vraiment agréable et tout le monde en profite.
Le soir venu, la tente installée dans le camping local (pas donnés d’ailleurs les campings britanniques : environ le double qu’en France), il est temps d’aller au pub ! Une première bière, une locale et d’ailleurs la meilleure de ces quelques jours de l’autre côté de la Manche.
La suite est tout aussi logique avec un traditionnel Fish & Chips !
Pour la seconde journée, l’entrée dans le Dartmoor s’effectue principalement par le suivi d’une ancienne voie ferrée et les ponts et tunnels se succèdent entre des vallées boisées et verdoyantes.
Des petits villages sont régulièrement traversés avec des images typiquement britanniques telles que ces marmelades et chutneys proposés à la vente sur le bord de la route.
Comme indiqué, il suffit de laisser la monnaie dans le trou de la table en échange de votre sélection. So British ! Commence dorénavant le vrai Dartmoor, plus sauvage dont les hauteurs (et la météo) font penser aux Monts d’Arrées.
La faune locale présente ses deux collections été & hiver.
Les chemins deviennent étroits et techniques dans ces sous-bois. J’ai d’ailleurs du mal à passer avec mes sacoches latérales.
Les chemins me mènent jusqu’à la ville de Okehampton avec parfois des signalétiques bien particulières (ici de la route 27 du réseau national). Par la suite (en fait je quitte le Dartmoor donc moins touristique), le balisage laisse fortement à désirer,
Par une route peu intéressante, j’arrive pressé par la pluie très menaçante au camping de Cheriton Bishop (évitez son camping !) au beau milieu du Devon. J’ai toutefois le temps de déguster, dans le salon de thé voisin, la spécialité locale : le « Devon Cream ».
Pour accompagner le thé noir au lait, le « Devon Cream » est composé de scones (des petits gâteaux peu sucrés, de véritables étouffe-chrétiens) que l’on déguste en y rajoutant la fameuse crème (très épaisse, presque du beurre) et la confiture. J’ai du mal à finir malgré une journée sur le vélo. Mais il faut tester ! Le lendemain, très grosse pluie pour rejoindre la côte via la ville d’Exeter puis la rivière Exe. La côte jurassique et ses dénivelés apparaissent sous la couche nuageuse en cet après-midi.
La pluie a été si forte que la mer n’est plus bleue mais ocre après que les rivières aient déversés les eaux de pluie. Mais bon, il faut que je roule encore : mon camping est au fond, en haut et dans les nuages ! Les pentes de la ce jurassique sont redoutables et celle pour atteindre le camping a raison de ma volonté et je pose pied à terre (la seule fois du séjour). Pas longue cette côte mais une pente estimée sur Google Earth avec des pointes à 18 %. Avec le soleil revenu (ce qui me permet de sécher ma tente pliée sous la pluie du matin), le coucher de soleil est magnifique sur cette côte (avec Sidmouth en contre-bas).
Pour y accéder, il faut emprunter les chemins de randonnée entretenus par l’association « National Trust ».
Le lendemain, ballade le long de la côte jurassique en empruntant les routes très très étroites (et toujours aussi pentues) de la campagne britannique. Bien que destinées à un trafic régulier, elles sont si étroites que deux véhiculent ne peuvent s’y croiser. Donc, des espaces sont disposés plus ou moins régulièrement sur les bas côtés afin que le véhicule le plus proche s’y arrête permettant à l’autre de passer (avec toujours un petit signe de remerciement).
Des villages typiques et tranquilles sont traversés avant de rejoindre la prochaine station balnéaire plus animée.
Plus colorée également tel ce parterre de fleurs de la ville de Seaton décoré en circonstance.
Par la suite la route quitte la côte pour trouver des paysages plus champêtres. Des portions (toujours aménagées) passent même à travers des champs. Pensant être tranquille pour la pause déjeuner, je me retrouve rapidement encerclé par des veaux bien curieux, attirés en fait par la couleur de mes sacoches.
La côte est retrouvée le soir en arrivant du côté de Burton Bradstock où se trouve un immense camping comme je les aime. Mais celui-ci n’est pas si désagréable et il est possible de profiter une nouvelle fois d’un joli coucher de soleil sur les falaises après un passage au pub local.
La route continue vers Weymouth qui aurait du être d’ailleurs la dernière ville britannique de ce parcours. Mais en planifiant un peu mon retour, je me rends compte que la liaison par ferry entre Weymouth et Guernesey n’est plus assurée … Je dois alors aller jusqu’à Poole. J’ai toutefois le temps d’effectuer un petit détour très ensoleillé vers Weymouth, station balnéaire bien typique du sud de l’Angleterre. Au passage, je m’arrête au monument Hardy : une tour en l’honneur d’un Amiral anglais qui s’est particulièrement distingué lors de la bataille de Trafalgar … Cette tour me permet toutefois un joli panorama sur les 4 comtés du Hampshire, du Dorset, du Somerset et du Devon. Elle me permet également de vérifier que mon fidèle destrier est toujours là, en bas.
Le soleil est toujours présent pour mon arrivée à Weymouth et sa plage. Celle-ci est plutôt animée et il est possible de trouver, en plus des baigneurs, un mini-parc d’attractions et un spectacle de marionnettes avec les aventures de Punch et Judy.
Pour le soir, retour à Dorchester où je passerai la nuit dans un B&B (une bonne adresse d’ailleurs: Aquila Heights) et ce pour 2 raisons : la première est de garantir de ma tente avant d’embarquer le lendemain soir sur le ferry retour, la seconde est le Breakfast anglais ! Au passage, un petit panneau bien sympathique. Depuis le début du séjour en Angleterre, ce n’est pas le premier que je note pour la promotion du vélo.
Au matin, le breakfast ! Un classique !
Dans les documentations du B&B, je note la présence toute proche de la plus grande colline fortifiée d’Europe ! Le Maiden Castle dont la surface est de 19 hectares. Avant de reprendre la route vers Poole je me rends sur place. Le site est effectivement immense et les fortifications se manifestent principalement par une série de 3 remparts en terre séparés de profonds fossés où gambadent les moutons qui ont pris possession des lieux.
Le site vaut vraiment le détour et je ne suis pas le seul à m’y intéressé. Pour preuve, les traces laissées dans le champ voisin.
Un crop circle (ou cercle de culture) ! Preuve d’une visite extra-terrestre, d’un phénomène paranormal ? Qui sait ? Dans tous les cas, des interprétations plutôt complexes ! Après toutes ces questions existentielles, je rejoins Poole sous une dernière bonne pluie britannique et en empruntant ce petit ferry permettant de passer du bon côté de la baie.
Les derniers kilomètres balisés avec ce panneau aux forme et couleurs bien locales.
Et le quai de Poole avec ses nombreux pubs typiques se présente.
Après une dernière petite bière, il est temps d’aller profiter du feu d’artifice se tenant juste ce soir.
Eh oui, c’est bientôt la fin de ce tour de Manche.
Le ferry pris durant la nuit effectue des escales par Guernesey et Jersey mais la météo pour les prochains jours n’est vraiment pas favorable pour une découverte de ces îles. Retour direct donc vers Saint-Malo sous un ciel bien gris.
Voilà donc pour ce tour de Manche effectué en solo. Bien que tout proche, celui-ci est suffisamment dépaysant principalement évidemment par la partie britannique. Même sur des terres logiquement bien connues en Bretagne, le fait de les parcourir en vélo permet de les redécouvrir avec un autre œil.
Et comme un tel petit séjour ne peut s’effectue sans un bon bouquin, je vous présente celui qui m’a accompagné pour ces quelques jours : « Les producteurs » d’Antoine Bello. Il s’agit du livre qui clôt la trilogie entamée avec « Les falsificateurs » et « Les éclaireurs ». En fait je ne peux que vous recommander d’entamer la lecture de cette trilogie, même si ce dernier opus n’est pas, à mon avis, à la hauteur des deux premiers qui sont eux excellents et très prenants avec les aventures de Sliv Dartunghuver au sein du Consortium de Falsification du Réel …
Pour terminer ce récit quelques chiffres : j’ai effectué une boucle de 800 km au total. Ma vitesse moyenne a été de 15 km/h (avec une vitesse minimale de 4,5 km/h dans les côtes britanniques et une vitesse maximale de 62 km/h toujours du côté britannique). Plutôt tranquille pour une reprise.et pas de problème technique à signaler.
La répartition des étapes :
- Jour 1 : Saint-Malo – Matignon
- Jour 2 : Matignon – Hillion
- Jour 3 : Hillion – Plouézec
- Jour 4 : Plouézec – Île Grande (Pleumeur Bodou)
- Jour 5 : Île Grande – Kernéléhen (Plouézoc’h)
- Jour 6 : Plouézoc’h – Île de Batz
- Jour 7 : Île de Batz – Roscoff
- Jour 8 : Roscoff – Plymouth – Horrabridge
- Jour 9 : Horrabridge – Cheriton Bishop
- Jour 10 : Cheriton Bishop – Salcombe Regis
- Jour 11 : Salcombe Regis – Burton Bradstock
- Jour 12 : Burton Bradstock – Weymouth – Dorchester
- Jour 13 : Dorchester – Poole
- Jour 14 : Poole – Saint-Malo
Du côté français, les voies empruntent alternativement des voies dédiées, des petites routes sans trop de circulation et quelques chemins. Le parcours s’effectue sans difficulté. Par contre du côté britannique, les dénivelés sont vraiment là et parfois l’étroitesse des routes et des chemins demandent une attention toute particulière.
Quelques rencontres cyclopédiques le long de ce parcours : en fait principalement des Anglais en France et des Français en Angleterre ! Ainsi Pavel, d’origine tchèque installé avec sa famille en Angleterre depuis une vingtaine d’année avec qui j’ai pu discuter le temps de la traversée entre Roscoff et Plymouth. Et ce couple de Briochins avec leur fille, reconnaissables à leur Gwen Ha Du flottant sur la remorque, que j’ai croisés à contre-sens entre le Devon et le Dorset.